Et si…
Et si l’on essayait de se
sortir la tête du sac, comme après une jolie soirée bien arrosée dans les
volutes de fumée et les miettes de tartines de bonne chère où l’on se sent
pousser les cheveux de l’intérieur et que le crissement de l’herbe qui pousse
sur la pelouse du square à deux cent mètres nous est insupportable ?
Et si l’envie soudaine nous
prenait de ne plus se regarder bêtement le nombril, vissé sur les écrans de nos
smartphones qui vampirisent nos vies et nos relations humaines, et de faire
comme naguère, des rencontres, des partages, des conversations de vive voix ?
Et si l’on se réveillait
après ce putain de vendredi treize qui n’a jamais autant mérité sa réputation d’une
léthargie molle et doucereuse où la société nous avait plongé, comme dans un
bain tiède et accueillant, et que l’on se rende enfin compte que nous ne vivons
pas dans le monde des Bisounours ?
Et si ce monde de Bisounours
méritait un bon coup de balai en des lieux où les barbes sont d’autant plus
longues que les idées sont courtes, mais également en des endroits où c’est le
priapisme du bras droit qui prime, ce monde de Bisounours où l’obscurantisme le
plus opaque veut prendre appui sur notre bon vieil hexagone en fauchant des victimes
innocentes ?
Et si les media, ces fameux
mass-merdias qui nous enfouissent les oreilles, nous remplissent les mirettes
et nous enfournent dans les synapses des quantités phénoménales d’informations qui,
au-delà du superflu, sont intégralement anxiogènes, arrêtaient une bonne fois
pour toutes de nous rabâcher que les victimes de la barbarie humaine étaient
innocentes ; puisqu’on a rarement vu des victimes coupables ?
Et si notre Flamby national
se révélait, dans l’adversité de ces évènements tragiques et face à une menace
qu’il ne faut surtout pas sous-estimer, être un vrai Président de la
République, voire un chef de guerre qui saura exterminer la vermine qui a cru
qu’on pouvait s’en prendre impunément aux chiens d’infidèles hexagonaux ?
Et si les chiens d’infidèles
que nous sommes, nous tous qui aimons boire des chopines fraîches en racontant
des blagues chaudes, engloutir des quantités industrielles de charcutaille bien
grasse, fumer comme des pompiers, baiser à couilles rabattues, siffler les
jolies femmes, et profiter de la vie en grugeant les impôts ; si les
chiens d’infidèles honnis allions pisser des tonnes de mitraille et de métal en
fusion sur les djellabahs moisies de rétrogrades décérébrés ?
Et si le Tout Mou pouvait
agir, plutôt que de faire à n’en plus finir des discours, certes empreints d’une
certaine gravité qui sied à l’instant ; on ne l’aurait pas véritablement
apprécié en costume de clown et nez écarlate assorti raconter des histoires de
Toto devant le Congrès ; agir vite et fort ?
Et si l’on savait, au moins
pour un moment, puisque le grand cirque politique reprendra tôt ou tard ses
droits et sa place, mettre ses guéguerres intestines sous le tapis, ranger ses rancœurs
pré ou postélectorales dans le placard pour former cette putain d’unité
nationale dont nous avons absolument besoin actuellement ?
Et si certain ex-locataire
de l’Elysée voulait bien fermer un instant son intarissable robinet à conneries
et s’arrêter de s’opposer bêtement aux propositions présidentielles pour qu’on
puisse avancer de manière constructive sur le difficile chemin de demain, semé de
kamikazes et de morts, hélas ?
Et si l’on essayait déjà d’agir
efficacement avec l’arsenal législatif actuel, pour ne pas se perdre en vaines
querelles politocardes qui brassent de l’air à n’en plus finir et qui
provoquent des dégâts proctologiques irrémédiables chez les diptères ?
Et si l’on applaudissait,
pour certains du bout des doigts, parce que je sais que c’est toujours
douloureux de jouer du banjo avec une râpe à carottes, Alain Juppé qui a eu les
couilles décidément au cul, bien accrochées et suffisamment grosses, pour
admettre que la droite a eu tort de supprimer des postes dans la sécurité ?
Et si l’on tentait tout de même,
parce que ça se fait en société, de s’étonner assez naturellement de l’annonce
par le Kremlin de ce que l’explosion du gros navion dans le Sinaï était un
attentat commandité par Daesh ?
Et si l’on remerciait à l’avance
le Kremlin, et son si jovial Poutine qu’on risque d’apprécier de plus en plus s’il
bombarde de manière plus intense des positions en Syrie qui risquent de ne plus
être celles des opposants au régime ?
Et si l’on se replongeait
dans nos bouquins d’histoire qui enseignent que les joyeux soldats de la
Wermacht qui avaient mis à bas la moitié de l’Europe en quelques semaines et en
1940 étaient shootés comme des jet-setters mondains ; et que l’on fasse le
lien avec les seringues retrouvées dans les chambres d’hôtel des terroristes ?
Et si l’on s’indignait à
juste titre de ce que des connards terminaux au bourrichon montés par des
connards encore plus intégraux se droguent afin de se sentir invulnérables et
tout-puissants, avant d’aller sulfater à la kalachnikov la bonne nouvelle du
prophète qui doit faire des loopings dans sa tombe d’avoir engendré autant d’imbécilité
pure ?
Et si l’on essayait, tout
simplement, de revenir à des choses plus terre-à-terre, plus en phase et en
prise directe avec notre quotidien routinier au train-train pas si désagréable
parfois ?
Et si je tentais de me
translater tout doucement vers des rivages plus sarcastiques, où les envolées d’antan, les
piques acérées comme des rasoirs coupe-chou, les vannes vachardes et les
remarques acides vous laissent comme l’impression de croquer dans un malossol saupoudré
de piment concentré avec une gingivite aiguë ?
Et
si j’étais assez tenté de répondre tout-à-trac que j’ai tiré la chasse et que
tout est parti avec un petit pipi et un gros caca, bien que je sente que vous
avez le reproche aux lèvres, l’œil enkhôlé assombri de noires remontrances et
le bras vengeur et séculier terminé d’un doigt fièrement dressé et remuant,
comme un prélude à un toucher rectal chez le proctologue ?
Et si l’on rendait tout
simplement un dernier hommage à Dora Doll, 93 ans aux pruneaux du bataclan
nouveaux, qui a rendu son dernier souffle dimanche, dans le Gard après
soixante-dix ns de carrière, plus de cent cinquante films et des amants comme
Jean Gabin ou Marlon Brando ?
Et si l’on se souvenait que le
17 novembre 1966, les Easybeats (ce qui ne veut pas dite « bite
facile » en français) sortent leur « Friday on my mind », tube
qui sera adapté en français sous l’improbable titre « vendredi
m’obsède »… ? Triste prémonition, en fait…
Et si… Et si… Avec des si,
on mettrait Paris en bouteille… Une bouteille qui flotte, mais ne coule pas !
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