Ma chère
tati,
Je sais que
tu n’es pas très branchée nouveaux modes de communications, j’ai encore le
souvenir que la tablette que t’avait offert le cousin Pacôme à Noël dernier avait
connu une fin tragique sous forme de planche à découper, alors je préfère t’écrire
cette petite bafouille plutôt que de t’envoyer un message sur le téléphone
portable, qui n’est pas le gros combine d’ébonite noir qui certes est portable.
Chère tati, je
tenais à te remercier de ton accueil pendant ces quelques jours, dans ton petit
chez-toi douillet, coquet et propret. C’est toujours un émerveillement de
sentir à pleines narines ces senteurs quasi-oubliées de naphtaline concentrée,
de grésil dans les commodités et de lessive de soude dans la cuisine…
Merci
également de m’avoir égalé de tes petits plats insurpassables, et
inracontables, dont toi seule à le secret, heureusement d’ailleurs… Comment
oublier ton inénarrable choucroute de pois-chiches aux filets de stockfish
sauce aux fraises rissolées à la mayonnaise de régime ? Comment arriver à
se priver de ton inestimable cassoulet de corned-beef aux sardines sauce
ananas-raifort ? Je t’avoue qu’on s’en relevait la nuit… mais pas pour en
reprendre…
Ah, ma tati !
Que n’aurais-je donné, outre ma collection complète de 78-tours de Mireille
Mathieu chantant du folklore polynésien en russe et de posters des premiers
adieux de Line Renaud (des fac-similés des peintures rupestres de la Grotte
Calvet, en fait), pour pouvoir slurper avec un air de contentement ultime et
des bruits de tuyauterie à envoyer au nirvana tout plombier normalement
constitué et par trop sensible du robinet, tes nouilles à la margarine et au
gruyère de régime trop cuites !
Ne t’offense
pas, ma tati ! Aspirer bruyamment les nouilles, avec ces bruits d’égout
que Tonton Raymond réussissait à merveille quand il siphonnait le réservoir de
la Frégate du voisin parce qu’il avait oublié de faire le plein de la Dauphine
(jusqu’à ce qu’il avale une bonne rasade de super), c’est considéré comme très
poli, et même recommandé au Japon. Oui, tu me diras avec raison que la
tambouille chez les bridés, c’est nippon ni mauvais…
Je dois
également te remercier de m’avoir préserver une année encore des manifestations
idiotes et citrouillardes de Halloween. Je sais que ton portail électrifié sur
du 380 vient à bout de tous les démarcheurs récalcitrants, et si ce n’étaient
les hurlements de douleurs des moutards qui jouaient à Claude François, la soirée
de lundi fut radieuse. J’ai juste remarqué qu’un Plan Vigimineurs avait été mis
en place rue de la Pompe avec douze cars de CRS pour empêcher le passage des
garçons un peu trop appétissants jusqu’aux grilles du pavillon de Jean-Marc
Morandini… Tu comprendras qu’il faut bien en laisser pour Monsieur le Curé…
Tu sais, ma
tati, séjourner chez toi est une sinécure, si l’on ne prête pas trop attention
aux boules de neige publicitaires sur le téléviseur du salon et à la toile de
Jouy orange sur fond vert-crème de poireau. On peut oublier les trépidations de
l’actualité moderne, vu que tu ne reçois encore que les trois chaînes de l’ORTF
avec les infos de Zitrone revues et corrigées par Peyrefitte…
Plus besoin
de choisir entre Hanouna et Morandini, entre la tante berbère et la
couscoussière sous pression, ou comme le dit Dave, l’ami d’Edam, entre la peste
et le choléra. Il va finir par nous décrocher le Prix Nobel, la meule de gouda…
Pas de prix
Nobel de la courtoisie et de la délicatesse chez nos hommes politiques, ma
tati. Je sais que tu t’entêtes à demander avec insistance le retour de Georges
Pompidou, ce ne sera pas pour tout de suite, il a encore quelques anthologies
poétiques à rédiger… Mais nos guignols politocards écrivent chaque jour l’anthologie
de l’indécence exponentielle. Entre Laurent Wauquiez, la honteuse qui fait pédé
avec des homosexuels mâles, qui plaisante sur la mort de François Hollande, « qui
ne serait pas une mauvaise affaire », et le staff du nain hongrois à
talonnettes qui publie sur le blog de l’énervé de l’omoplate la nécro de Juppé
à l’occasion de la fête des citrouilles, je t’avoue que ça donne véritablement
envie de foutre une bombe à l’Assemblée un jour de séance plénière…
De toute
façon, Flamby ne pourra pas descendre plus bas dans les sondages, quoi qu’il en
soit capable. Ah oui, c’est vrai que tu n’es pas très familiarisée avec les pourcentages,
et que dix pour cent de pénalité aux impôts te paraissent une aubaine. Alors,
pour te faire une idée de ce que peuvent bien représenter 4% de français
satisfaits, je te dirais que c’est environ 160.000 personnes, soit la taille d’une
ville comme Toulon… C’est te dire l’étendue de sa popularité… Je serais Juste
Imbibé (le Luis Mariano enroué de nos générations de pisseuses hystériques), je
me ferai du souci…
Ma tati, tu
connais mes goûts pour les objets inhabituels, insolites voire curieux, et tu t’es
étonnée que je loue à grands renforts de superlatifs laudatifs ta collection de
sous-bocks en chachlick mercerisé tricoté au point de croix renforcé. Mais je
pense avoir dégoté sur ebay, c’est un site internet d’enchères où tu achètes à
prix d’or des trucs inutiles et où tu refourgueras dès le 26 décembre tes
cadeaux de Noël pourraves, le summum du kitsch : revendu par un dmeandeur
d’asile, un bébé de quelques semaines, très peu servi, presque propre malgré
une consommation de couches inquiétante, à un prix d’appel de 5.000 euros.
Tu te rends
compte du scandale ! 5.000 euros un bébé ! Cinq mille euros un sac à
bave, un réservoir de pisse intarissable, une station d’épuration ambulante qui
vagit comme trois sirènes d’alerte atomique toutes les nuits ? Y en a qui
ont le sado-maso dépensier… Perso, j’achète le dernier album de Louane, je le
fais jouer à plein volume, et j’ai le même résultat pour moins de quinze euros…
Ma tati,
pardonne-moi mais je t’ai subtilisé ton Ici-Dimanche fauché chez ta coiffeuse :
il contenait trois informations qu’il m’a paru essentiel de mettre en lumière
façon interrogatoire au 36 Quai des Orfèvres : Tout d’abord le Royaume du
Maroc en émoi après la mort tragique d’un vendeur de poisson broyé par une
benne. Faut les comprendre, les couscoussières : on se demande si le bâtonnet
Findus d’hier soir n’avait pas un arrière-goût de merguez…
Ensuite, le
chat offert par Marinette à Bobby Ménard qui saccage l’appartement de l’édile
biterrois et terrifie son labrador… Il a été élevé en camp de concentration, ou
bien ?
Enfin, l’UNESCO
a trouvé l’arme ultime contre Daesh sans bouillir, le fléau intergalactique qui
va réduire les enturbannés à néant en moins de temps qu’il ne faut à Kendji, la
Gitane sans filtre, pour apprendre à chanter à peu près juste, c’est-à-dire deux
ans : ils ont nommé porte-parole contre la radicalisation Céline Dion… On
table sur un KO technique à la douzième chanson…
Et le 2
novembre 1979, à quinze heures quinze, c’était le KO terminal Porte de
Clignancourt pour l’homme aux mille visages, Jacques Mesrine, qui finit truffé
aux pruneaux au volant de sa BMW immatriculée « 83 CSG 75 ». Un
gangster qui attache sa ceinture de sécurité et qui roule dans une berline
évoquant un futur impôt… Tu diras ce que tu voudras, ma tati, mais y a plus de
mitan ! Quelle époque !
Vivement que
je revienne faire un tour dans ton espace temps décalé…
Je t’embrasse
ma tati.
Ton
Groniqueur.
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