Les flonflons aigres de l’orgue limonaire Gavili du
Lekkerkerker égrènent les notes langoureuses de la valse « Amour et
printemps » tandis que sur l’écran 625 lignes couleur défilent des images
antédiluviennes des stars passées du grand écran, plongeant dans l’asthénie
totale les téléspectateurs en proposant la vision d’un film de 1928, dans sa
version d’origine…
Combien de vendredis soir prometteurs d’un weekend
ensoleillé furent soudain assombris par ce lancinant et immuable rituel du
Ciné-club, à une époque où la télévision ne cherchait pas l’audience à tout
prix en enfermant des abrutis mononeuronaux dans un studio où ils seraient
filmés sous toutes les coutures et dans toutes les positions possibles ?
Combien de fins de semaine furent endeuillées par des
pelloches oubliées pour le bien-être national, exhumées par la main vicieuse
d’une paire de cinéphiles sadiques, persuadés d’œuvrer pour l’érudition
hexagonale ?
Combien de fois ai-je redouté ce générique suicidogène en me
demandant quelle vieillerie serait à l’écran, après la présentation
atone ? Dans mes souvenirs, le mélange s’était fait avec le Cinéma de
Minuit, sur la troisième chaîne, avec la voix maniérée, savant mélange de
Jacques Chazot mâtiné de Droopy pour le côté apathique, de Patrick Brion, un
genre de Frédéric Mitterrand sous perfusion de tranxène concentré, fait partie
de la mémoire collective, néanmoins, au même titre que les bêtasses hésitations
auvergnates de Danielle Gilbert, les roucoulantes présentations de Catherine
Langeais et les rocailleux « Bonjour » d’Yves Mourousi.
Infatigable enthousiaste du cinéma classique, celui qui ne
cherchait pas la facilité, Claude-Jean Philippe s’est éteint à l’âge de 83 ans,
et c’est avec lui une nouvelle mémoire du cinéma qui s’évapore…
Entre 1971 et 1994, il avait invariablement présenté des
films exigeants, éloignés du bling-bling actuel, le dimanche soir jusqu’en 1975
puis le vendredi soir, après le tout aussi mythique Apostrophes de Bernard
Pivot… De nos jours, après un énième zapping présenté par une potiche façon
Anne Gaëlle Ricco ou Mathieu Delormeau, on se voit proposer la soixante-douzième
diffusion de « On se calme et on boit frais à Saint Tropez »…
Chaque époque à les Socrate qu’elle mérite… A l’époque, on
flaquait devant Nabokov et le Docteur Mabuse. Aujourd’hui, on est au nirvana
avec les dernières bouses de Christophe Maé et les gugusseries d’Arthur…
Il faut pourtant trouver du divertissement là où il est
censé se trouver. A l’époque, on n’avait guère que l’augmentation du prix de
l’essence, la croissance du chômage et les bruits de bottes soviétiques en
Afghanistan pour se torturer le cortex. Aujourd’hui, les enturbannés de Daesh
sans bouillir nous donnent du mouron à foison…
Le premier coup d’essai transformé à grande échelle des
illuminés du Coran, s’il avait marqué les mémoires, n’avait pas pour autant
crée de climat d’inquiétude. Le strike des deux gros navions dans les tours
jumelles, c’était il y a quinze ans… Déjà ! Cela semble si loin et
pourtant chacun de nous se souvient précisément de l’endroit où il se trouvait
quand il apprit la nouvelle…
Aujourd’hui, on ne prend même plus la peine de se souvenir,
vu que les annonces se succèdent… En parallèle avec les pêches miraculeuses de
dangereux terroristes qu’on arrête au bord de la perpétration de leurs
méfaits : bombonnes de gaz à Notre Dame, prévision d’attentats à la Tour Eiffel…
Y a pas à dire, ça vous file le moral et une patate d’enfer avant d’attaquer
une nouvelle semaine !
Surtout que les apprentis-terroristes se recrutent presque
dès le berceau ! On a arrêté samedi à Paris un mineur de quinze ans tout
prêt à « tuer des gens » selon ses déclarations… Continuez à jouer la
benoîte indifférence et à prôner le « tout va très bien Madame la
Marquise », messieurs de l’exécutif ! A croire qu’il vous faut encore
des Nice, des Magnanville et des Bataclan pour vous sortir enfin les doigts du
derche…
Pendant ce temps, on vous dore la pilule, on vous fait
miroiter des baisses d’impôts tombant à point pour permettre au culbuto élyséen
de se représenter, on annonce avec tambours, trompettes, et l’orchestre
symphonique de Radio France, l’augmentation du budget de la culture d’environ
cinq pour cent… Jack Lang, reviens, ils sont devenus fous !
Fous, ou complètement cons, comme la nouvelle Miss Météo de
Canal +, qui amoncelle les boulettes depuis le début du Grand Journal,
l’émission sponsorisée par les apnéistes profonds tant elle flirte avec une
audience nulle… Ornella Fleury a réussi à balancer des blagues homophobes sur
Brigitte Boréale, une présentatrice transgenre dont on ne peut pas a priori
louer la féminité triomphante, et à créer le malaise autour de l’acteur
américain Jonah Hill, un ourson dodu, énumérant ses pires nanards et se
gaussant de son physique de représentant de chez Olida.
Quand on se remémore les années dorées de Canal avec le duo
De Caunes Gildas, on a envie d’ouvrir le gaz de la gazinière électrique…
Pas tout de suite… Il faut bien profiter des gesticulations
du Pépère’s Lonely Mou-du-genou Fumiste Band qui veut maintenir l’activité d’Alstom
à Belfort. Quand on voit le succès remporté dans le dossier Arcelor…
Vous reprendrez bien une tranche de pompier volontaire
pyromane qui s’est fait heureusement gauler à Milhaud après avoir allumé plus d’une
quarantaine de départs de feu dans l’été… A part avoir le feu quelque part, je
ne vois pas…
Et on n’aurait pas pu se passer de ce délicieux quiproquo, à
l’occasion de la sortie de l’iPhone 7, annoncé partout avec la légende « This
is 7 ». Le souci est qu’en cantonais, sept se dit « tsat », ce
qui est l’argot pour pénis… La pomme n’avait certainement pas prévu cette
couille…
Et le 12 septembre 1963, Porsche présente au salon automobile
de Francfort un modèle qui deviendra un mythe : le modèle 901… Qui sera
renommé pour la commercialisation en 1964 911, Peugeot ayant l’exclusivité des
numéros avec un zéro central. A quoi tiennent les mythes…
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