jeudi 27 février 2014

Brèves du 27 Février 2014




- Ah la la la la ! Si c’est tout de même pas malheureux de voir ça !
- Oh ça, c’est ben vrai ça, M’âme Jeanssen… Mais de quoi que c’est que vous causez ?
- Eh ben, M’âme Badrignard, de ce que c’est qu’ils ont causé l’autre soir dans le poste… Comme quoi tout change tout le temps et que de nos jours les jeunes ne respectent plus rien !
- Ah voui ! Mais ça c’est à cause de tout ce qu’ils nous envoient dans la lune, comme disait Jacques Chazot… Déjà qu’on risque de prendre un cactus dans le myocarde avec le trou dans la couche d’eau jaune… On a peur de sortir avec son sac à main maintenant… Dites, vous savez que l’autre jeudi, le neveu de M’âme Pichet s’est fait bousculer dans une queue par un loubard qui a voulu lui voler son téléphone…
- Le neveu de M’âme Pichet ? Le jeune Guy-Louis ? Celui qui met des chemises roses et des colifichets tout plein partout ? Le pauvre, déjà qu’il ne ferait pas de mal à une fille…
- Voui, lui-même… Même que le voyou n’a pas cessé de lui dire « vieille tante »…
- Faut dire qu’avec sa dégaine qu’on dirait qu’il a une crise d’hémorroïdes aiguë, il a quand même plus l’air d’une vieille tente que d’une caravane neuve, hein !
- Quand même, quand on voit ce qu’on entend et qu’on lit ce qu’ils nous font voir… eh ben moi je regretterai presque le temps du Général De Gaulle, vous savez…

Si la vérité sort souvent de la bouche des enfants (et c’est ainsi qu’on a appris que le sexe de Michael Jackson s’appelait vérité), nos aînés à cheveux bleus et bandages herniaires Gibaud savent aussi décocher, entre deux cuillérées de tapioca, quelques fulgurances frappées au coin du bon sens et de la colle à dentier Polident…

De nos jours, on ne respecte plus personne ni grand chose… On s’attaque aux monuments de la culture et l’on n’a de cesse depuis plusieurs années, sous prétexte de les moderniser, de charcuter les œuvres passées ou d’en donner de nouvelles versions qui vrilleraient les tympans de sourdingues célèbres.

Cela a commencé à l’aube des années 1990 avec la mode des remixes, où des techniciens de studio aux esgourdes remplies de déjections humaines odorantes se sont obstinés à échantillonner les succès passés pour en livrer des versions modernisées qui à défaut de menacer d’entrer tout droit au Panthéon des immortelles œuvres musicales, accéléraient grandement le transit intestinal tout en posant la question cruciale des droits d’auteurs et des droits voisins du droit d’auteur sur ces « œuvres » remises au dégoût du jour.

Sans vouloir me pousser du col, vous pourrez trouver quelques éléments de réponse dans la thèse de doctorat en droit très documentée dont je suis l’auteur, « Les artistes-interprètes face aux nouvelles technologies" » (670 pages reliées pleine peau de fesses, Bibliothèque Universitaire de Montpellier, 2002… dépêchez-vous, il doit en rester quelques exemplaires qui vous permettront de caler à moindres frais l’armoire normande de la chambre d’amis)…

Après les chansons, des criminels se sont mis en tête de commettre de nouvelles moutures des chefs d’œuvre cinématographiques et l’on a vu fleurir des navets tout juste bons pour la soupe populaire qui quittaient l’affiche avant même que la colle ne soir sèche… Faites-vous mal quelques instants en vous remémorant le remake du « Schpountz » avec Smaïn exécutant au premier sens du terme le personnage créé par Fernandel, ou la nouvelle version télévisée de la trilogie marseillaise de Pagnol avec Roger Hanin remplaçant Raimu… Ah ! la bouillabaisse et la partie de carte avec l’accent couscous-merguez, c’est à regretter d’avoir rapatrié les pieds noirs…

Ensuite, les couineuses à nichons et autres invertis pur sucre issus des télécrochets modernes n’ont eu d’autre solution pour espérer surnager dans le marigot de la variété que de réinterpréter à leur sauce, bien fade mais largement sur dosée en éclats de voix et dégueulis de tripes façon Lara Fabian au mégaphone, les pages incontournables de la chanson francophone… La version du « Jour se lève » (original grandiose de 1971 par la voix grave d’Esther Galil) mise dans la glotte polie au tabac brun et à l’alcool fort de Garou donne des envies de nuit éternelle…

Et si l’on s’en était arrêté là, tout irait assez bien dans le moins mauvais des mondes…

Mais non ! Voilà t’y pas que nos politiques s’y mettent aussi avec Pépère qui nous donne à apprécier sa version socialiste de « On m’appelle Simplet » de Fernandel ; Nadine Morano dont la classe naturelle et le langage châtié de bas de fosse feraient passer l’inculture cucul et l’inconvenance sexy de BB au faîte de sa gloire pour les plus hautes cimes du bon goût et du raffinement ; Montebourg et Le Pen qui nous en remettent un coup sur l’air du « Je t’aime moi non plus » de Gainsbourg et Birkin (qui à l’époque n’hésitaient guère à mettre leur traversin sur la place publique)… Jusqu’à notre Premier Sinistre qui serait presque tenté de pousser la chansonnette avec un « Y’a d’la joie » interprété avec la spontanéité d’un croque-mort dépressif…

Et hier soir, au journal télévisé de la RTBF, qu’a-t-on appris, les yeux écarquillés en version Marisol Touraine sous ecstasy et la bouche largement ouverte comme Sylvie Vartan après une question d’arithmétique élémentaire pour faire aérer le neurone ? On risque de porter atteinte à l’intégrité de notre vénérable Concours Eurovision de la Chanson, pour changer les paroles de l’une de ses chansons lauréates !

Déjà que les rengaines de ce rendez-vous annuel paneuropéen de la canzonetta mièvre et démodée ne brillent pas par leur originalité (les bouses d’Obispo en comparaison, c’est du Beaudelaire sur papier bible), si en plus, on veut les modifier pour les adapter au goût du jour et aux revendications de certains bourgmestres du Plat Pays… Il ne reste plus qu’à envisager de se suicider avec une saucisse de Strasbourg tiède et à ouvrir plein pot le gaz de sa cuisinière électrique…

Figurez-vous que le monument commémorant la bataille de Waterloo ne se trouverait pas sur le territoire de la morne plaine célébrée par Totor Hugo, mais sur celui de la commune voisine, Braine L’Alleu… D’ici à ce qu’ils obligent ABBA à modifier les paroles de leur chanson fétiche, 1er Grand Prix Eurovision 1974, il n’y a qu’un pas qu’on risque de franchir à la vitesse d’un pet foireux sur une toile cirée…

Ah, ils auraient eu belle figure, les quatre comiques du quatuor infernal, à devoir chanter à Brighton ce 6 avril 1974 un truc dans le genre :

« Déjà à Braine L’Alleu, Napoléon a dû se rendre
« Et moi je crois que mon destin prend aujourd'hui le même chemin
« Les livres d'histoire et la vie racontent la même comédie
 « Braine L’Alleu – Tu es vainqueur et je perds la guerre
« Braine L’Alleu – Je me constitue ta prisonnière
« Braine L’Alleu – Je ne peux plus fuir et plus t'échapper
« Braine L’Alleu – Pour la vie je promets de t'aimer
« Who who whoa... Braine L’Alleu – Il est arrivé, mon Braine L’Alleu »…

Avouez que ce serait fumant, non ? Fumant, tout comme cette nouvelle qui ne mégote pas en nous enseignant que l’e-cigarette fait pour la première fois baisser la consommation de tabac, en repli de 7,6 %… Quand on vous dit qu’on veut tout changer… Tout s’en va en fumée, décidément…

Poussière, tu redeviendras, comme les cendres de la cigarette de la vie… Une pensée pour Quentin Elias, un des membres du boys-band Alliage qui par la suite avait exhibé son membre bien musclé dans des productions pornographiques gay, à défaut de retrouver le succès discographique, découvert mort dans son appartement new-yorkais à l’âge de 39 ans… Et c’est le temps qui court… Et les boys ne bandent plus…

Ce qui ne changera pas, c’est notre quotidien regard dans le rétroviseur des étagères de la mémoire, puisque c’est le 27 février 1933, à Berlin, que le Reichstag, siège du Parlement allemand, prend feu, sans doute à l'initiative des SA nazis, commandités par Hermann Göring. Un demi-fou communiste Marinus van der Lubbe est cependant accusé du forfait et Adolf Hitler, chancelier depuis moins d'un mois, en prend prétexte pour interdire aussitôt le KPD (Kommunistische Partei Deutschlands, parti communiste allemand)… Quand on vous disait qu’ils ne respectent plus rien…

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