Guitare en mains, moumoutte
pure acrylique laquée au Kärcher, pantalon moulebite en tergal luisant gris
souris avec sous-pull en Dralon orange assorti, il est là, devant le micro,
fixant la caméra de ce regard délavé et tombant de cocker triste, prêt à nous
crucifier d’un récital de trois heures trente au cours duquel on verra à
intervalle régulier en arrière-plan les ambulanciers débarrasser sur des
brancards les spectateurs inanimés, le créateur de « L’eau vive »,
des interminables émissions télévisées « Bienvenue », de la chanson
luxembourgeoise au Concours Eurovision 1977 et de la plus célèbre paire de
lèvres botoxées à mort, s’apprête à l’ouvrir…
Qui ne se souvient de ces
souvenirs télévisés douloureux, immanquables ingrédients des soirées de
réveillons qui vous poussaient à éteindre le poste, et à l’annonce desquels
grand-mère se défonçait les tympans à grands coups de tisonnier, le chien
sautait par la fenêtre et le papier-peint à motifs floraux se décollait de
lui-même…
Et devant les caméras noir et
blanc de la première chaîne de l’ORTF, notre Guy Béart national égrenait avec
la régularité d’une pendulette en marbre rose quelque peu ébréchée et pas mal
sonnée les titres-phares de son répertoire, nous amenant surement à des envies
de suicide au gaz grâce au four de la cuisinière électrique et à la somnolence
totale passées les 23h30…
Si l’on avait eu la chance
d’avoir Christophe Maé comme dinde de réveillon de Noël, l’intégrale de ses
succès aurait été plus succincte, et l’on aurait pu aller pioncer dès 21h15…
Alors qu’avec
l’inextinguible troubadour à la voix faussée, on se tartinait des chansons à
rallonge pendant des heures, prenant soudain conscience de ce que pouvait être
l’éternité… Ah, on s’en souviendra du « Grand Chambardement », du
« Chahut bahut », du « Tournez rotatives », du
« Demain, je recommence »…
Demain, je recommence… un
joli titre, qui s’applique si bien à l’actualité du jour, tant les titres des
torche-culs, feuilles de chou, journaux honnêtes et quotidiens qui font bien au
café à côté de son déca et de son e-clope, nous servent du réchauffé…
Vu les températures qui
fraîchissent (il était temps, fin octobre avec des velléités de manches
courtes, c’est pas franchement logique), on aurait bien besoin de se
réchauffer…
Mais si c’est pour se fader
les sempiternels poncifs dont nos journaux regorgent à en vomir de lassitude,
non, merci bien !
Ras la casquette de se
tartiner les énièmes épilogues conclusifs de l’affaire Léonarda, ce vomitif
cageot kosovar dont les parents attaquent désormais l’état français en
réclamant un titre de séjour…
Par-dessus le brushing des
pas-de-deux gouvernementaux sur l’ecotaxe contre laquelle les bretons (qui ont
des chapeaux ronds, ne l’oublions pas) se battent jusqu’à nous en beurrer la
raie comme un kouign-aman trop gras… Dont le Ministre Le Foll nous dit qu’il ne
peut revenir en arrière mais dont Z’Ayrault annonce la suspension (bonjour la
cohésion ministérielle…)…
Plus envie d’écouter
quotidiennement les exploits hollandouillesques de chute dans les sondages
qu’on croirait au final qu’on a élu le premier président spéléologue…
Marre d’entendre les
journalistes télévisés (la crasseuse à perruque de la Une et le Playmobil à
moumoutte en crin de la Deux) agiter des hochets pour nous détourner de nos
inquiétudes quotidiennes pour faire bouillir la marmite et essorer nos
économies à régler nos impôts…
On se contretape le
coquillard de savoir que Fabius est en visite en Slovaquie, on en a rien à
battre que l’institutrice accusée de la mort d’un gosse puni ait été relaxée,
on se tartine le fondement de la victoire en appel des Castorama pour rouvrir
le dimanche…
Ah ça ! Quel plaisir de
voir le dimanche matin déambuler dans les rayons des beaufs de première
pression encore mal remis de la beuverie de la veille, l’œil cerné d’un
container, l’haleine chargée à la 1664, le jogging luisant qui colle aux
profiteroles et le tee-shirt douteux où l’on lit le menu de la veille…
Allez, brisons-là le flot de
ma mauvaise humeur (un temps de chiotte, une nuit courte, ça suffit à vous
retourner un homme, et je ne parle pas de ce qui se passe dans votre dos au
bois de Boulogne…)…
Voyons les anniversaires du
jour, puisqu’en c’est en ce 29 octobre, qu’en 1923 naît la république Turque
(célèbre pour ses chiottes) ; en 1946 Cocteau sort sa belle bête pour Jean
Marais… enfin, sa « Belle et la Bête » ; en 1959 naît
Astérix ; en 1965 que Ben Barka est enlevé en plein Paris ; en 1966,
Brel abandonne la scène à l’Olympia ; et en 1981, Brassens signe avec la
Camarde au bas d’un parchemin…
Et le 29 octobre 1963, sort
sur les écrans le film de Jean-Luc Godard, « Le mépris » inspiré du
roman d’Alberto Moravia, avec une Brigitte Bardot brune pour l’occasion. L'histoire
d'un couple qui tombe en désamour, au cours d'un séjour professionnel, à propos
d'un scénario de film et son tournage… Rien d’exceptionnel, surtout lorsqu’on
sait que Godard est à la réalisation… Et pourtant, la musique de Georges
Delerue relève le tout, ainsi que le cultissime échange Bardot-Piccoli sur les
parties de son anatomie : « Et mes fesses, tu les aimes, mes
fesses »… Elle aurait dû regarder Piccoli, elle aurait bien vu que oui… Une
forme d'hommage à Brassens, puisqu'il pense nécessairement à Fernande...
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