Un mois et un jour.
Un mois et un jour que l’ensemble des Barreaux de France
observe un mouvement de grève pour contester le projet de réforme des retraites
issu du cerveau fécond et fait con de nos politocards gouvernementaux.
Un mois et un jour que les robes noires manifestent leur
mécontentement à l’égard de ce projet si mal ficelé que même le Conseil d’Etat
s’en aperçoit.
Un mois et un jour que les baveux ont arrêté toute activité
plaidante pour rouspéter face à cette usine à gaz si mal ficelée que seul le
Gouvernement ne s’en aperçoit pas.
Un mois et un jour que les Avocats français sollicitent le
renvoi de tous les dossiers, sous le regard goguenard, amusé, puis tour à tour
circonspect, dubitatif et désormais franchement agacé des magistrats.
Un mois et un jour que ces reports occasionnent des
incidents d’audience qui vont parfois jusqu’au clash judiciaire.
Un mois et un jour que les médias s’en tamponnent le
coquillard avec un dédain qui force le respect, démontrant de manière évidente
que les temps glorieux de l’ORTF et de sa censure étatique ne sont pas révolus.
Un mois et un jour que la presse écrite et la
radio-télévision traite ce mouvement d’une ampleur inédite avec un détachement
trop marqué pour être franchement honnête, s’amusant presque de ces remous dans
un gobelet occasionnés par des nantis égoïstes, assimilés à des enfants gâtés
refusant de prêter leurs beaux joujoux.
Un mois et un jour que les manifestations diverses et
variées conduisent à un mutisme gouvernemental claustral qui, lorsqu’il est
brisé, retourne la chose contre les Avocats à grands renforts de communiqués
officiels verbeux et sonnant aussi creux que le crâne d’un candidat de
téléréalité.
Un mois et un jour que l’on nous promet des mesures
d’accompagnement pareilles à l’horizon, s’éloignant à chaque fois que l’on s’en
approche.
Un mois et un jour que l’on nous serine que le futur régime
universel des retraites nous octroiera des pensions améliorées et un système
compensatoire de la hausse exponentielle des cotisations, en balançant enfin
des tableaux explicatifs aussi incompréhensibles que la règle d’un jeu de Guy
Lux.
Un mois et un jour que l’on se dit que le mode d’emploi en
moldoslovaque médiéval d’un brémouzard semicyclonique à favouille sousglissante
par autogyre d’un moltegomme à sousbassement tyzéroïque par décompensation
gazeuse d’un schmilblick en chachelink mercerisé serait plus aisé d’abord.
Un mois et un jour que l’on voit clair dans le manège
gouvernemental et que l’on refuse catégoriquement de se laisser assassiner en
faisant disparaître la majorité des petits cabinets d’avocats.
Un mois et un jour que l’on constate que le dialogue avec un
mur aphone apporterait plus de satisfactions intellectuelles qu’avec la
pelletée d’incapables méprisants qui se sont mis en tête de nous gouverner en
nous imposant ce qu’ils estiment excellents pour nous, ignorant superbement que
le remède est bien plus dangereux que le mal.
Un mois et un jour.
Pour un résultat proche du zéro intégral, pour une
concertation qui se borne à la réitération d’une ligne de conduite qui
s’apparente clairement à un crash-test à pleine vitesse contre un mur
inébranlable.
Un mois et un jour que les justiciables, bercés par les
rares reportages aux ordres les abreuvant de contrevérités, de demi-mensonges
et de bobards éhontés, nous prennent pour ce que nous ne sommes pas.
Un mois et un jour que la bonne marche de nos cabinets est
perturbée.
Un mois et un jour que le Grand Doudou et la fripée de la
place Vendôme n’osent pas nous dire les yeux dans les yeux qu’ils veulent nous
faire disparaître. Qu’ils soient rassurés, les difficultés financières
qu’engendrent ce grippage national de l’institution judiciaire, si elles
devaient perdurer encore plusieurs semaines, auront raison de la plupart d’entre-nous
bien avant la mise en place de leur réforme de mes deux…
Un mois et un jour.
Pour quel résultat ? Vaporeux, à tout le moins. Des
annonces de propositions de projets de mesures d’accompagnement qui sont dans
leur principe même parfaitement inaudibles.
Nous nous mettons en danger ? Nous en avons l’habitude,
puisque notre marotte immarcescible est de défendre. Défendre, toutes et tous,
contre toutes et tous. Combattre l’injustice, dire le droit, faire respecter la
loi, souvent contre ceux qui l’ont édictée.
Nous serons probablement vaincus, mais nous aurons combattu.
La guerre n’est pas finie, enfin, semble-t-il puisque des
étapes restent à franchir avant que la réforme ne soit effective. Ne comptons
pas sur l’Assemblée Nationale, qui se faire cocufier une fois encore à grands
coups de 49-3 dans le patapoum et passer une fois de plus pour une Chambre
d’Enregistrement de la volonté gouvernementale.
Osons placer quelque espoir sur le Conseil d’Etat qui peut
retoquer la Loi et renvoyer le Jupiter élyséen dans ses pénates. Gageons que le
merdier actuel coûtera le maroquin à certains ministres qui ont autant
d’ouverture d’esprit qu’une meurtrière encombrée.
Un mois et un jour que nous ferraillons, non pas pour nous,
pour nos petits intérêts individuels, mais pour Vous.
Vous. Les françaises et les français, vous tous qui pouvez
demain, dans huit jours ou trois mois devenir des justiciables. Et qui serez
bien démunis face à une institution judiciaire sans une robe noire à vos côtés.
Pensez-y. Demain, peut-être il sera trop tard. Et n’espérez
pas de miracles comme à Lourdes. Sans l’Avocat, il ne vous restera plus que
Lisieux pour pleurer.
Et le 7 février 1985 disparaissant Matt Monro, un chanteur
britannique qui représenta l’ Royaume-Uni au Concours Eurovision 1964 avec la
chanson « I love the little things ». J’aime les petites
choses ? Le projet de réforme des retraites n’en est pas une, apparemment…

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire