mardi 29 octobre 2024

Brèves du 29 Octobre 2024

 Guitare en mains, moumoutte pure acrylique laquée au Kärcher, pantalon moulebite en tergal luisant gris souris avec sous-pull en Dralon orange assorti, il est là, devant le micro à pied, fixant la caméra de ce regard délavé et tombant de cocker triste, prêt à nous crucifier d’un récital de trois heures trente au cours duquel on verra à intervalle régulier en arrière-plan les ambulanciers débarrasser sur des brancards les spectateurs inanimés, le créateur de « L’eau vive », des interminables émissions télévisées « Bienvenue » où l’on fumait comme des sapeurs et on ne buvait que rarement de la Volvic, de la chanson luxembourgeoise au Concours Eurovision 1977 et de la plus célèbre paire de lèvres botoxées à mort (Emmanuelle « Canard wc » Béart pour ceux qui aiment à se souvenir d’elle pour se faire peur), s’apprête à l’ouvrir…

Qui ne se souvient de ces souvenirs télévisés douloureux, immanquables ingrédients des soirées de réveillons qui vous poussaient à éteindre le poste, et à l’annonce desquels grand-mère se défonçait les tympans à grands coups de tisonnier, le chien sautait par la fenêtre avec un hurlement de douleur et le papier-peint à motifs floraux se décollait de lui-même…

Et devant les caméras noir et blanc de la première chaîne de l’ORTF, notre Guy Béart national égrenait avec la régularité d’une pendulette en marbre rose quelque peu ébréchée et pas mal sonnée les titres-phares de son répertoire, nous amenant sûrement à des envies de suicide au gaz grâce au four de la cuisinière électrique et à la somnolence totale passées les 23h30…

Si l’on avait eu la chance d’avoir Christophe Maé comme dinde de réveillon de Noël, l’intégrale de ses succès aurait été heureusement plus succincte, et l’on aurait pu aller pioncer dès 21h15…

Alors qu’avec l’inextinguible troubadour à la voix faussée, on se tartinait des chansons à rallonge pendant des heures, prenant soudain conscience de ce que pouvait être l’éternité… Ah, on s’en souviendra du « Grand Chambardement », du « Chahut bahut », du « Tournez rotatives », du « Demain, je recommence »…

Demain, je recommence… un joli titre, qui s’applique si bien à l’actualité du jour, tant les titres des torche-culs, feuilles de chou, journaux honnêtes et quotidiens qui font bien au café à côté de son déca et de son e-clope, nous servent du réchauffé…

Vu les températures qui fraîchissent (il était temps, fin octobre avec des velléités de manches courtes, c’est pas franchement logique), on aurait bien besoin de se réchauffer…

Mais si c’est pour se fader les sempiternels poncifs dont nos journaux regorgent à en vomir de lassitude, non, merci bien !

Ras la casquette de se tartiner les énièmes développements sanglants et anxiogènes de la guerre ouverte au Proche-Orient, renchéris quotidiennement des déclarations belliqueuses des impétrants, dont on se demande désormais s’ils n’ont pas intégralement pété les câbles et qu’ils ne vont pas nous déclencher un conflit mondial dans les plus brefs délais…

Par-dessus le brushing des pas-de-deux gouvernementaux sur la discussion interminable autant qu’houleuse du budget 2025 dont les chaînes infos nous abreuvent jusqu’à nous en beurrer la raie comme un kouign-amann trop gras…

Si ces ergotages n’entraînaient pas le pays sur une pente savonneuse et plus que dangereuse en termes de tranquillité sociale, on pourrait presque se féliciter que nos dépités de l’hémicycle soient au boulot plus de trois heures par semaine…

Plus envie d’écouter quotidiennement les exploits macronesques de chute dans les sondages qu’on croirait au final qu’on a élu le premier président spéléologue…

Marre d’entendre les journalistes télévisés agiter des hochets pour nous détourner de nos inquiétudes quotidiennes pour faire bouillir la marmite et essorer nos économies à régler nos impôts…

On se contretape le coquillard de savoir que le locataire de l’Elysée est en visite officielle au Maroc, histoire de réchauffer nos relations diplomatiques et de se goinfrer de sucreries, on en a rien à battre que le procès de Depardieu ait été renvoyé au printemps prochain parce que l’accusé était indisposé, on se tartine le fondement de savoir que la SNCF ne diffusera pas la publicité pour le bouquin de Bardella dans les gares françaises…

Comme si on avait le temps de baguenauder et d’admirer les affiches quand on doit prendre le train…

On se fout avec la dernière énergie de la dernière ligne droite de la présidentielle américaine où les deux candidats redoublent d’outrances dans une campagne à couteaux tirés, puisque de toute manière, il y a fort à parier que le Connard à l’orange va obtenir un second mandat…

Est-ce que les journalistes croient réellement nous intéresser l’espace d’une nanoseconde avec l’info selon laquelle le siège du nouveau parti politique d’Eric Ciotti soit situé juste en face de celui des LR ?

N’y a-t-il pas des choses plus importantes, plus interpellantes que ces broutilles qui ne mériteraient même pas un court entrefilet en quatrième de couverture d’une obscure feuille de la presse quotidienne régionale ?

On nous beurre la raie avec la série basée sur l’aventure Loft Story de 2001, dont même les mononeuronaux s’accordent à reconnaître que c’est une sombre bouse ; on délaie jusqu’à l’insapidité intégrale l’opération pour une lésion cervicale subie par le Premier Sinistre ce week-end…

Franchement, on voudrait me foutre en boule et m’incliner à ne plus m’adonner à ma coupable industrie de chroniques qu’on ne s’y prendrait pas autrement !

Allez, brisons-là le flot de ma mauvaise humeur (un temps de chiotte, une nuit courte, ça suffit à vous retourner un homme, et je ne parle pas de ce qui se passe dans votre dos au bois de Boulogne…)…

Et le 29 octobre 1963, sort sur les écrans le film de Jean-Luc Godard, « Le mépris » inspiré du roman d’Alberto Moravia, avec une Brigitte Bardot brune pour l’occasion. L'histoire d'un couple qui tombe en désamour, au cours d'un séjour professionnel, à propos d'un scénario de film et son tournage… Rien d’exceptionnel, surtout lorsqu’on sait que Godard est à la réalisation… Et pourtant, la musique de Georges Delerue relève le tout, ainsi que le cultissime échange Bardot-Piccoli sur les parties de sa généreuse anatomie qui accasionnait encore bien des émois et des draps souillés : « Et mes fesses, tu les aimes, mes fesses »… Elle aurait dû regarder l’entrejambe de Piccoli, elle aurait bien vu que oui… Une forme d'hommage à Brassens (qui décèdera pile-poil le même jour en 1981), puisqu'il pense nécessairement à Fernande dans ce cas…